C'est une bonne nouvelle : au moins les paroles sonnent bien. La Stratégie de tourisme durable d'Espagne 2030 (approuvée par le Conseil des ministres le 21/10/25 – https://www.hosteltur.com/172322_el-consejo-de-ministros-da-luz-verde-a-la-estrategia-espana-turismo-2030.html) redéfinit le modèle de gouvernance du tourisme à partir d'une approche collaborative, transversale et multiniveau, en où les citoyens et les communautés locales occupent une place centrale. Cette stratégie repose sur la reconnaissance du fait que le tourisme est un phénomène complexe qui affecte de multiples dimensions du territoire et nécessite donc une gestion partagée entre tous les acteurs impliqués. En ce sens, il est affirmé que « les caractéristiques de l’activité touristique elle-même rendent indispensable d’aller vers la consolidation d’un modèle de gouvernance collaborative basé sur l’alignement et la coopération des acteurs de l’écosystème » (p. 74).
L’un des principes directeurs de la stratégie susmentionnée est de « placer l’humain au centre », ce qui implique de reconnaître le rôle des résidents en tant qu’acteurs fondamentaux dans la construction du tourisme. Il est à noter que « les résidents et les communautés locales cohabitent avec le tourisme et participent à l'expérience d'accueil. Leur attitude, leur hospitalité, leurs traditions et leur mode de vie constituent le caractère authentique des destinations. Pour que le tourisme soit véritablement durable, il est essentiel que les personnes qui habitent les destinations se sentent impliquées, écoutées et bénéficiées » (p. 71). Cette vision se traduit par la nécessité pour les résidents d'être non seulement des bénéficiaires du tourisme, mais également des protagonistes de sa planification et de sa gestion.
La Stratégie propose des mécanismes pour garantir cette participation. D'une part, la création d'un groupe de travail au sein du Conseil espagnol du tourisme (CONESTUR) est envisagée, incluant la participation citoyenne, dans le but d'innover dans les espaces de gouvernance et de renforcer la légitimité démocratique des décisions touristiques. D'autre part, le renforcement des organisations de gestion de destination (OGD) est encouragé, qui ont évolué « en surmontant le rôle traditionnel de marketing et de promotion pour devenir des organisations de gestion de leurs territoires » (p. 28) ; À cette fin, ces organisations doivent intégrer les résidents dans leurs structures de gouvernance, permettant leur implication dans la prise de décision concernant le modèle touristique local.
Les citoyens sont également considérés dans la Stratégie comme un agent clé dans la construction des destinations. Les « personnes qui font des destinations » sont reconnues comme celles qui « conçoivent, planifient, gèrent et protègent les destinations touristiques », notamment les agents publics, les techniciens de l'aménagement du territoire, les opérateurs institutionnels et les acteurs du développement local (p. 70). Cette catégorie comprend les résidents organisés, dont la participation est essentielle pour garantir que le tourisme s'articule de manière cohérente avec l'identité et les besoins du territoire.
De même, la Stratégie souligne l'importance de promouvoir une « coexistence équilibrée » entre touristes et résidents, en abordant des problèmes tels que la saturation touristique, la pression sur le logement ou la perte du sentiment d'appartenance. Il est affirmé que « la relation entre touristes et résidents doit se développer dans un cadre de respect, d’harmonie et d’hospitalité » et que « l’existence de destinations touristiques vivantes, avec des voisins, est précisément ce qui maintiendra une culture vivante et donnera une identité aux destinations » (p. 50). Dans ce cadre, sont promus la réglementation des logements à usage touristique, la mesure de la capacité d'accueil des destinations et la mise en œuvre de campagnes de sensibilisation destinées tant aux touristes qu'aux résidents.
Cette approche s'aligne sur les propositions développées par Vargas-Sánchez (2020, 2022, 2023, 2024), qui a défendu la nécessité d'un nouveau modèle de gouvernance du tourisme qui dépasse la vision hiérarchique et favorise les structures participatives, en particulier dans les contextes d'après-crise, comme celui dérivé de la pandémie de Covid-19. Dans leurs travaux, il est souligné que la gouvernance du tourisme doit être orientée vers l'inclusion des communautés locales en tant que sujets actifs dans la prise de décision, non seulement pour des raisons éthiques, mais aussi pour leur capacité à fournir des connaissances contextuelles, à générer une légitimité et à garantir la durabilité sociale à long terme : « la gouvernance du tourisme doit être comprise comme un processus relationnel, dynamique et adaptatif, dans lequel les acteurs locaux jouent un rôle irremplaçable dans la construction de destinations résilientes et durables ». (Vargas-Sánchez, 2024).
En bref, la stratégie Tourisme Espagne 2030 propose une transformation profonde du modèle de gouvernance du tourisme, dans lequel les citoyens cessent d'être un acteur périphérique et deviennent un axe central. La participation active des résidents dans les OGD, dans les organismes de concertation tels que CONESTUR et dans les processus de planification territoriale, est considérée comme une condition nécessaire pour évoluer vers un tourisme véritablement durable, inclusif et résilient. Nous serons attentifs à votre candidature et à l’itinéraire que vous avez dans chaque destination.
Références
Gouvernement espagnol. (2025). Stratégie de tourisme durable d'Espagne 2030. Secrétaire d'État au Tourisme, ministère de l'Industrie et du Tourisme. https://www.turismo2030.es/
Vargas-Sánchez, A. (2020). Crise du Covid-19 : Un nouveau modèle de gouvernance touristique pour une nouvelle époque. Thèmes mondiaux de l'hôtellerie et du tourisme, 12(6), 691-699. https://doi.org/10.1108/WHATT-07-2020-0072
Vargas-Sánchez, A. (2022). Le scénario post Covid-19 : vers un nouveau modèle de gouvernance du tourisme ? Dans E. Christou et A. Fotiadis (Eds.), Redémarrer le tourisme, les voyages et l'hôtellerie (pp. 1–10). Sindos, Grèce : Université hellénique internationale.
Vargas-Sánchez, A. (2023). Gouvernance du tourisme et rôle des communautés locales (Avis émis n° 6). Madrid : AECA, Commission du Tourisme.
Vargas-Sánchez, A. (2024). Gouvernance du tourisme et communautés locales. Revue AECA, 146, 32-34.
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