71 % des nuitées d'hôtel réservées via des agences en ligne en Europe dépendent d'un acteur dominant : Booking.com, selon un rapport de l'association hôtelière européenne Hotrec. Cette plateforme est-elle la ennemi par excellence des hôtels ? La réalité est que les hôteliers et Booking entretiennent une alliance conflictuelle. Les deux parties ont besoin l’une de l’autre, mais elles s’affrontent également sur plusieurs fronts, y compris devant les tribunaux.

Une relation ambivalente

Le concept « Frenemy », une combinaison des mots anglais ami (ami) et ennemi (ennemi), cela nous aide peut-être à comprendre la relation ambivalente entre Réservation.com et les hôtels.

D'une part, Booking.com agit comme un allié des établissements en facilitant les réservations, en augmentant la visibilité des hôtels et en attirant des clients qui ne les trouveraient pas autrement.

Cependant, de nombreux hôteliers perçoivent également cette plateforme comme un « ennemi » en raison des commissions qu'elle leur facture et du contrôle qu'elle peut exercer sur les prix et les politiques de vente.

Désormais, les relations dans ce mariage de convenance peuvent se détériorer, compte tenu des nouveaux fronts judiciaires qui s'ouvrent.


Distribution hôtelière en Europe

Comme on peut le voir dans l'infographie interactive, avec les données compilées par Statista à partir du rapport « Hotel Distribution Study » de Hotrec, 55 % des nuitées dans les hôtels en Europe ont été vendues l'année dernière directement par les établissements eux-mêmes. Il y a dix ans, ce pourcentage était proche de 60 %

En revanche, 30,8% des nuitées ont été réservées via des OTA. « Les deux acteurs dominants sur le marché de l'hébergement hôtelier sont Booking Holdings et, dans une moindre mesure, Expedia Group. Booking détient 71 % du marché OTA10 % de plus qu’il y a dix ans. Expedia détient une part de marché proche de 15 %, en hausse de 2 % ces deux dernières années », explique Hotrec.

Nuitées dans des hôtels en Europe en vente directe

  • 2013 : 59,4 %
  • 2015 : 55,2 %
  • 2017 : 55,1%
  • 2019 : 55,0 %
  • 2021 : 59,7%
  • 2023 : 55%

Nuitées dans des hôtels en Europe via des intermédiaires en ligne

  • 2013 : 21,8 %
  • 2015 : 25,5%
  • 2017 : 29,3%
  • 2019 : 29,2%
  • 2021 : 28,7%
  • 2023 : 30,8%

Part de marché (nuitées d’hôtel) des principales OTA en Europe

  • Réservation de participations 71 %
  • Groupe Expedia 14,4 %
  • HRS 4,6%
  • Autres 10 %

Bataille judiciaire entre hôteliers et Booking

Le mariage de convenance entre Booking Holdings et les hôteliers européens entre désormais dans une phase plus délicate. Les relations entre les deux parties ont été compliquées par deux événements survenus cette année : l'amende de CNMC en Espagne et la désignation de Booking comme portier dans l’UE (dans le cadre de la loi sur les marchés numériques).

Amende CNMC et recours collectifs

D'un côté, il y a l'amende de 413 millions d'euros que la CNMC a infligée à Booking.com pour abus de position dominante, en instaurant des clauses de parité dans les contrats avec les établissements d'hébergement. Pour l’heure, Booking a fait appel de cette amende historique.

Cependant, le Association espagnole des directeurs d'hôtels (AEDH) indique que le recours ne paralyse pas le dépôt de plaintes contre Booking.

De son côté, la Confédération espagnole de l'hôtellerie et de l'hébergement touristique (CEHAT) étudie une voie de réclamation « qui permette aux hôteliers d'agir en toute sécurité et en s'appuyant sur une base juridique solide, pour réclamer une indemnisation pour l'utilisation de clauses abusives dans les contrats hôteliers. » .com ».

Le syndicat patronal CEHAT envisage de mener cette initiative en collaboration avec des partenaires européens regroupés au sein de l'Hotrec, avec l'appui de cabinets d'avocats spécialisés en droit de la concurrence.

Le CEHAT rappelle que les clauses de parité imposées par Booking aux hôteliers, déclarées contraires à la concurrence par la Cour de Justice de l'Union européenne (CJUE), « ont limité la libre concurrence en empêchant les hébergements de proposer des prix inférieurs via d'autres canaux de vente, ce qui a a eu un impact économique très négatif sur le secteur.

Loi sur les marchés numériques et « changements cosmétiques »

D'autre part, la Commission européenne a désigné Booking comme contrôleur d'accès, ce qui oblige l'OTA à se conformer à la loi européenne sur les marchés numériques (DMA).

Toutefois, les hôteliers européens, représentés par Hotrec, considèrent que jusqu'à présent Booking n'a procédé qu'à des « changements cosmétiques » pour s'adapter au DMA.

Selon Marie Audren, PDG d'Hotrec, « les hôtels sont quotidiennement confrontés à des pratiques commerciales déloyales de la part de Booking.com : pertes financières, stress opérationnel et atteinte à leur réputation. Cela doit cesser. Les salons DMA et des règles numériques sont un premier pas dans la bonne direction pour résoudre ces problèmes urgents.

« Booking.com cache les données des clients à ses partenaires hôteliers et empêche les hôtels de proposer de meilleurs prix sur leurs propres sites Web. L’abordabilité, la transparence et le choix sont cruciaux pour les consommateurs et les voyageurs européens. Cela devrait enfin être résolu grâce au DMA », ajoute le directeur d'Hotrec.

Booking se défend des critiques

De son côté, Booking déclare fonctionner depuis le 14 novembre « dans le respect de la loi sur les marchés numériques dans l'Espace économique européen », après avoir été désignée comme portier.

La société a également publié un article sur son blog fournissant des détails sur le processus de consultation et de collaboration avec la Commission européenne, ainsi qu'un résumé général des mesures de conformité à la DCE. Voir l'approche de Booking.com concernant la loi sur les marchés numériques.


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